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08 Fév 2023

« C’est par la grâce de Dieu que ma formation au sacerdoce a été possible »

L'abbé Élie Hatangimbabazi, ancien directeur national des Œuvres pontificales missionnaires au Rwanda, nous raconte comment il a vécu son parcours de formation vers la prêtrise alors que son pays traversait la pire crise de son histoire.

Je suis prêtre diocésain au Rwanda. J’exerce mon ministère dans le diocèse de Nyundo qui est situé au Nord-Ouest du pays.

Avant d’être ordonné prêtre, j’ai suivi le cheminement prescrit par les orientations de l’Église catholique. À travers ces quelques mots, je voudrais partager avec vous les événements ayant marqués ma formation au sacerdoce durant la période où notre pays traversait les crises les plus tragiques de son histoire.

J’ai eu l’intuition d’aspirer à la formation au sacerdoce quand j’étais à l’école secondaire dans un collège subventionné par le gouvernement et dirigé par les prêtres diocésains de Butare (cela veut dire que je n’ai pas fait les études secondaires au petit séminaire, comme c’est le cas pour la majorité des prêtres au Rwanda). C’était en 1991. Notre pays était en crise. La guerre était prise entre l’armée gouvernementale et l’armée du Front patriotique rwandais (constituée par les anciens réfugiés rwandais). Au moment où il y avait des jeunes de mon âge qui aspiraient à aller sur le front de bataille selon leurs penchants politiques, la vocation sacerdotale m’attirait comme voie pour servir mon peuple qui avait besoin d’union et de paix. Grâce à l’accompagnement de l’équipe chargée de la pastorale des vocations du diocèse de Butare, j’ai été admis au Grand séminaire, année propédeutique de Rutongo en octobre 1993. La guerre, les divisions entre les Rwandais, la pauvreté et la famine étaient à leurs apogées!

Malgré les crises que connaissait notre pays, nous avions de bons formateurs au Grand séminaire qui nous encourageaient dans notre cheminement avec l’idéal de faire de nous des semeurs de paix, d’unité, de réconciliation et d’espoir dans notre société divisée avec un avenir incertain. Le sens de l’unité et de persévérance tel qu’inspirées de l’Évangile, fut le paradigme de notre formation. Je me souviens bien que nous étions 103 séminaristes à la propédeutique, provenant des neuf diocèses du Rwanda, et jusqu’à Pâques, qui a eu lieu le 3 avril 1994, il n’y avait aucun signe de division parmi nous. Ce n’est que le lendemain, lors du début des vacances de Pâques, qu’un tragique malheur s’est abattu sur le pays (le Génocide commis contre les Tutsi commença le 7 avril 1994). Pendant les trois mois de folies au Rwanda, certains de nos formateurs et nos confrères séminaristes ont perdu leurs vies. Nous autres, qui étions encore vivants, nous étions dispersés les uns dans les décombres du pays détruit, les autres en refuge en République démocratique du Congo, en Ouganda, en Tanzanie, et au Burundi. Quand les évêques ont décidé de rouvrir le Grand séminaire en septembre 1994, j’étais parmi les sept seuls séminaristes à participer à sa réouverture, le 28 septembre 1994!

Pendant ces périodes de crises indicibles, nous avons bénéficiés de l’assistance morale, spirituelle et matérielle des Églises sœurs du monde entier, surtout à travers les interventions diverses de l’Œuvre pontificale de Saint-Pierre-Apôtre et ses collaborateurs. Un proverbe rwandais affirme qu’un vrai ami se reconnait pendant les périodes de difficultés. J’ai fait l’expérience de cette réalité au moment où je me confrontais aux processus de discernement vocationnel.

Sans l’apport de bons formateurs au séminaire, sans la solidarité missionnaire des Églises sœurs et la présence de jeunes comme moi, déterminés à servir l’Église souffrante du Christ au Rwanda, il aurait été difficile pour moi de résister aux tentatives des personnes qui nous décourageaient sous prétexte que beaucoup de baptisés rwandais n’ont pas été témoins de la paix durant les situations difficiles que le pays venaient de traverser.

Parmi les personnes que nous ne cessons de remercier suite à leurs contributions à notre formation au Grand séminaire, nous citons toujours les personnes qui, sous l’anonymat et depuis leurs pays respectifs, se privaient de leurs temps et de leurs bien matériels pour prier et financer notre formation au sacerdoce. J’ai eu la joie de rencontrer en 2017 une famille d’Autriche qui avait contribué à ma formation à mon insu. De tels gestes de partage sont des fruits de gratuité et d’amour, fruits de la foi vivante.

Ma formation s’est déroulée dans un climat de crises, et pourtant je suis devenu prêtre. Les crises n’ont pas posé d’obstacle à mon cheminement. Je ne me sentais pas tout seul; j’ai eu de bons formateurs qui m’ont témoigné et enseigné l’idéal du ministère d’un prêtre; le soutien des personnes – connues ou pas – a favorisé ma résistance à l’appel pour servir l’Église du Christ à jamais. Même en crise, l’appel au ministère sacerdotal est possible! J’en suis témoin!

Restons en union de prière pour affronter les crises du moment et celles à venir, sans jamais perdre l’espoir. Saint Paul le dit bien : « là où le péché s’est multiplié, la grâce a surabondé » ( Rm 5, 20).

 

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